Définir l'hypnose avec le patient lors de la première consultation
Avant toute chose, il est essentiel d’aborder la question suivante : « Qu’est-ce que l’hypnose pour vous ? »
Cette question est importante car les patients arrivent avec une idée relativement précise de ce que peut être la thérapie. Cette question se posera si le patient fait la demande d’hypnose mais aussi si c’est le thérapeute qui fait la proposition. Il s’agit à travers cette question de rencontrer les attentes, les craintes et généralement les idées erronées que la personne peut avoir de l’hypnose. L’hypnose Erickonnienne est très différente des représentations habituelles et il est souhaitable de lui expliquer en quoi cela va consister.
Présentation de hypnose par le thérapeute
L’hypnose est un état banal, des phénomènes de transe peuvent survenir dans la vie de tous les jours lorsque l’attention volontaire se porte vers l’intérieur d'une personne plutôt que vers ce qui l’entoure. L’exemple le plus classique est le voyageur en train ; il peut très bien arriver à destination sans garder de souvenir très précis des péripéties du voyage, tout simplement elle a pensé à autre chose de plus important pour elle.
L’hypnose est un état d’hypervigilance « focalisée », en l’occurrence sur des idées et des sensations internes. Pendant ce temps là le patient est parfaitement vigilant, il reste en alerte et est capable de réagir aux sollicitations externes si elles lui semblent importantes ; il n’est donc pas question de sommeil, même si la présentation extérieure peut rappeler cet état. Cet état de relaxation n’est pas indispensable, le patient peut être dans un état d’hypnose même lorsqu’il parle et qu’il présente d’une manière qui n’évoque en rien le sommeil.
La transe peut se dérouler de beaucoup de manières différentes, c’est le patient qui détermine ce qui lui semble le plus satisfaisant y compris la profondeur de la transe. Cette profondeur est d’ailleurs, en général, très fluctuante.
La transe est un état actif dans lequel le patient contrôle ce qui se passe et accepte ou refuse ce qu’il veut. Ce n’est pas le thérapeute qui va imprimer dans l’esprit « blanc » du patient les suggestions et solutions à ses difficultés. Au contraire le patient va effectuer un travail intense, consciemment et inconsciemment, travail qui pourra l’aider dans la résolution de ses difficultés.
Il est important pour le thérapeute de tenir compte des idées que le patient lui apporte au sujet de l’hypnose avec ses mots et ses compréhensions à lui. Si le patient pense qu’il s’agit de quelque chose comme la relaxation, on l’acceptera ; s’il pense qu’il ne faut pas relâcher la vigilance et qu’il craint d’être sous la domination du thérapeute, on lui dira encore qu’il a raison et on pourra lui conseiller de rester le plus vigilant possible…
Précautions oratoires
Il faut prévenir le patient qu’il va probablement être surpris ; il va pouvoir ressentir des sensations nouvelles, probablement agréables, mais il se peut aussi qu’il éprouve des sensations désagréables ou inquiétantes. Il doit savoir que le thérapeute surveille en permanence et enregistre des petits phénomènes externes dont il n’a pas forcement conscience mais qui préviennent le thérapeute (il n’est pas nécessaire de nommer ces phénomènes ; à titre indicatif, il peut s’agir d’une accélération de la respiration, de petits mouvements d’agitation dans les doigts, d’une contraction des maxillaires…). Souvent le thérapeute établira d’ailleurs avec le patient un code non-verbal pour prévenir si il se sent bien ou non ; par exemple bouger un doigt de la main droite pour dire oui, un doigt de la main gauche pour dire non. Il suffit alors au thérapeute de poser des questions et de lire les réponses. Cependant, le patient doit savoir qu’il garde en permanence, le droit de sortir de la transe, pour quelque raison que ce soit.
Cette précaution est importante car certaines suggestions peuvent faire revenir à la conscience des souvenirs très désagréables ; ce n’est pas le but de l’hypnose qui s’efforce au contraire de faire travailler le patient à un niveau inconscient. Une bonne maîtrise technique doit éviter de genre d’inconvénients qui parasite la séance d’hypnose et n’apporte rien de positif par cette approche.
Il arrive qu’à l’issue de cette phase préliminaire le patient soit déjà dans une transe légère ; en effet il a fixé son attention sur ce qu’il imagine, sur ce qu’il va pouvoir ressentir c'est-à-dire qu’il présente une attention focalisée sur des phénomènes internes.
Le dernier point évoqué, peut chronologiquement se passer avant cette discussion sur l’hypnose : il s’agit de l’anamnèse du sujet. Au-delà de l’anamnèse classique et indispensable concernant les difficultés, leur histoire, le contexte, les autres démarches thérapeutiques…, il faut rechercher des données spécifiques dont le thérapeute doit tenir compte pour éviter des avatars techniques. S’est-il passé dans un passé récent ou plus ancien des faits traumatisants (décès d’un proche, accident, maladie, intervention chirurgicale, …) ? Existe-t-il chez le patient une localisation douloureuse actuelle ou ancienne (si ce n’est pas le motif de la demande) ? L’intérêt pour le thérapeute est de lui éviter d’évoquer involontairement ces difficultés qui n’ont peut-être rien à voir avec la situation présente. Ceci dit, il pourra aussi lui sembler pertinent d’utiliser activement ces données mais il le fera alors en connaissance de cause.
Extrait Erickson à propos des dangers de l’hypnose :
« Il y a un patient qui arrive en disant : "Je viens ici parce que le Dr Untel m’a envoyé mais il dit que l’hypnose est dangereuse. Maintenant, ce patient s’attend vraiment à ce que je discute ce qu’il vient d’annoncer. Il s’attend vraiment à ce que je défende l’hypnose. Bien, je ne vais pas faire ce que le patient s’attend que je fasse. A la place, je déclarerai : "Oui, vous savez, c’est comme de conduire une voiture. Il y a au moins cent façons de conduire une voiture dangereusement, peut-être plus de cent. Je ne me suis jamais embêté à trouver toutes les façons de conduire dangereusement une voiture parce que je préfère simplement conduire avec prudence. Et je considère l’hypnose de la même façon. J’aime utiliser l’hypnose avec prudence, avec précaution et doucement. ».